L’enfant terrible de la lunetterie en Autriche
jeudi, avril 30 2020 | 10 h 16 min | Communiqué de presse, Magazine Optik
On disait de lui qu’il était un fou, un génie créatif, un brillant organisateur et même le fondateur de la lunetterie indépendante. Il est là-haut, au sommet du panthéon des « dieux de la lunetterie », avec de rares autres. Sa vie excentrique et sa fin infâme ont cependant relégué son génie créatif à l’arrière-plan.
Suite à son mariage avec une célèbre actrice et chanteuse, Udo Proksch est devenu un acteur majeur de la scène artistique, sociale et politique de l’Autriche. Il a acheté le fameux café viennois Demel en 1972. Un an plus tard, il a fondé au-dessus du café le Club 45, un club privé vite devenu l’un des lieux les plus fréquentés de la ville. S’y croisaient des espions (c’était l’époque de la Guerre froide), des chefs d’États et politiciens, des artistes et des vedettes du cinéma.
Un pionnier de la lunetterie indépendante
Proksch a révolutionné la manière d’approcher la lunetterie. Dans les années 1950 et au début des années 1960, les montures étaient encore largement considérées comme de simples appareils médicaux. C’était avant l’essor des licences de marque et des montures de créateurs. Quelques artistes avaient fait leurs preuves, tels Pierre Marly ou Oliver Goldsmith, mais Udo Proksch a amené cela à une autre échelle. Il a été recruté par Wilhelm Anger, le fondateur d’Optyl, en gagnant un concours d’art. C’est ainsi qu’il a été nommé directeur de la création pour Carrera. Il a aussi travaillé sur Viennaline, qui est devenue une marque très populaire à l’époque. Sa monture Gigi a été vendue à plus de 15 millions d’exemplaires. C’était très nouveau de connaître un tel succès avec une monture de créateur. Puis il a lancé sa propre collection : Serge Kirchhofer. Il était tellement investi dans la marque que le nom figurait comme alias légal dans son passeport. Il a apporté une nouvelle vision, qui dépassait la création et incluait la présentation, le branding et le marketing.
Un génie qui tourne mal
Malheureusement, son histoire s’est très mal terminée. En 1977, le vraquier Lucona dont il était propriétaire a coulé dans l’océan Indien, causant la mort de six membres de l’équipage. Mais il a été prouvé plusieurs années plus tard que le navire avait été détruit par une explosion. Udo Proksch avait tenté d’extorquer une compagnie d’assurances.
Éclaboussés par le scandale, des ministres autrichiens ont dû démissionner pour avoir couvert les activités criminelles d’Udo Proksch. Il a trouvé refuge quelques années aux Philippines, dans le palais du dictateur Ferdinand Marcos. Udo Proksch est finalement revenu en Autriche et a fini sa vie en prison où il est mort en 2001 lors d’une chirurgie cardiaque.
La vie et l’œuvre d’Udo Proksch font l’objet d’un ouvrage fascinant, Udotopia, rédigé par Luisa Jean Cooper. Michael Jardine, fondateur de Mondottica et de Brando Eyewear, et initiateur de ce projet, s’est entretenu avec Jean-François Venne. L’entrevue complète est présentée dans le numéro d’avril-mai du magazine Optik.
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