Par Dre Jenny Lee, OD
Deux semaines après le début de l’année scolaire, de jeunes adultes de retour en classe demandent frénétiquement un rendez-vous chez l’optométriste. Le récit, bien que présenté différemment, évoque toujours une histoire familière : les étudiants, en particulier ceux de l’enseignement supérieur, constatent que leur vision n’est plus aussi nette qu’avant. Certains peuvent même présenter des maux de tête qui les distraient de leurs travaux scolaires. L’augmentation des cours en personne après des années de confinement dû à la pandémie et un ordinateur portable comme seul compagnon ne font que mettre en évidence ce problème criant.
La réponse initiale est évidente : avec l’avènement de l’apprentissage en ligne pour tous les groupes d’âge, il n’est pas surprenant que la myopie chez l’adulte soit en hausse. Deux ou trois clics de moins dans le réfracteur suffisent généralement à ces anciens emmétropes pour apprécier la ligne 20/20.
Par contre, il est important de fournir non seulement les conseils appropriés à ces patients, mais également d’incorporer des outils afin de réduire les symptômes tels que les maux de tête, la fatigue oculaire et l’irritation de la surface oculaire.
La fatigue oculaire numérique affecte aussi les enfants
La fatigue oculaire numérique n’est pas un concept nouveau. Diverses affections oculaires peuvent être attribuées à une augmentation du temps passé devant un écran, telles que le syndrome de l’œil sec et le stress ou spasme d’accommodation. Par exemple, une exposition excessive aux écrans a déjà été liée à une atrophie sévère des glandes de Meibomius chez les enfants de 6 à 17 ans.
Un bref examen de la surface cornéenne à la lampe à fente peut déjà mettre en évidence des signes du syndrome de l’œil sec; il vaut donc la peine de l’ajouter à l’examen de la vue standard chez les enfants. Cependant, la tension causée par l’augmentation du temps passé devant un écran et le travail de près sur la vision binoculaire n’est pas aussi évidente et peut souvent se masquer derrière d’autres symptômes insaisissables.
Le retour en classe met en évidence les problèmes de vision
Prenons l’exemple d’un adolescent qui entre à l’université après avoir passé tout l’été à jouer intensivement dans une équipe de soccer. Il déclare avoir subi une commotion il y a quelques mois, mais n’a jamais eu de symptômes et a été autorisé à continuer de jouer durant toute la saison. Maintenant, après quelques semaines d’école, il remarque des maux de tête fréquents, une vision floue de loin et un manque de motivation en classe.
En tant que professionnel de la vue, on pourrait envisager de convaincre cet adolescent que les lunettes sont tendance et le diriger vers un opticien. Cela pourrait résoudre le problème initial de plisser des yeux en classe. Cependant, il est important de considérer la multitude de problèmes de vision binoculaire qui se développent rapidement chez ce groupe d’âge, confronté à des exigences de travail intensif en vision de près. L’école est déjà mentalement exigeante, et le fait de devoir gérer des symptômes supplémentaires, qu’ils soient liés à la commotion ou non, peut rendre de tels obstacles encore plus insurmontables.
Il n’est pas nécessaire d’être un spécialiste en thérapie visuelle ou en réadaptation pour ajouter des éléments dans votre bureau d’optométrie pour aider à dépister et mettre en évidence le besoin potentiel d’une aide supplémentaire à l’école et aider ces patients à améliorer leur qualité de vie. Au contraire, identifier les étudiants qui pourraient bénéficier d’une thérapie visuelle ou même d’une thérapie avec lunettes spécialisées, tels les verres avec une faible addition de près, pourrait aider à améliorer considérablement les symptômes.
Pensez aux lunettes pour ordinateur qui sont déjà prescrites aux pré-presbytes qui passent fréquemment des heures devant un ordinateur, que ce soit au bureau ou à la maison. N’oubliez pas que les jeunes enfants passent aussi autant de temps, sinon plus, devant un écran.
Intégrer le dépistage des problèmes de vision binoculaire
De plus, l’inclusion de questionnaires ou de sondages dans la salle d’attente peut aider à identifier facilement les jeunes ayant besoin d’une intervention. Le sondage d’évaluation des symptômes d’insuffisance de convergence (Convergence Insuffiency Symptom Survey ou CISS) est un exemple de sondage qui peut être facilement utilisé dans votre bureau d’optométrie et qui peut aider à mieux quantifier les symptômes liés aux problèmes de vision binoculaire, tels que l’insuffisance de convergence.
Le groupe d’investigation de l’essai clinique « Convergence Insufficiency Treatment Trial (CITT) » a déjà déterminé que les scores du CISS peuvent distinguer les enfants atteints d’insuffisance de convergence symptomatique, et n’ont pas été influencés par la partialité de l’examinateur. Cependant, certains écrits indiquent que le dépistage de l’insuffisance de convergence peut ne pas être indiqué car les symptômes visuels peuvent être courants et sans rapport avec des problèmes de vision binoculaire. Il est donc important de se fier à son propre jugement clinique pour interpréter les résultats de tels questionnaires et sondages.
Le test King-Devick est un autre exemple de test de dépistage qui peut être facilement utilisé dans votre bureau d’optométrie avec un minimum de formation ou d’équipement requis – il suffit d’avoir un papier, un stylo et un livret. En évaluant la vitesse de dénomination rapide des nombres, le test peut dépister les patients ayant subi une commotion cérébrale et souffrant de symptômes à long terme. Les personnes ayant subi un traumatisme crânien se sont avérées plus lentes de plus de cinq secondes durant le test King-Devick.
Alors que les étudiants entament une nouvelle année scolaire, saisissez cette occasion pour identifier et traiter précocement les problèmes de vision binoculaire avant qu’ils ne commencent à affecter les études et la qualité de vie de nos jeunes.
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